Tuesday, December 13, 2011

La baraka de Mamadou II

La baraka de Mamadou II

Réveillé par le tapage de mes canards tôt ce matin, le 567éme Dimanche du troisième millénaire…., j’ai hésité entre aller au fameux souk de Médenine, faire un bain de foule et un trop plein de brocantes, ou aller humer les traces de mes ancêtres sur les plages de l’Île aux Lotophages, ou encore aller renifler les derniers silex et coquilles d’œuf d’autruche sur les « Gataaya » de Zarzis sud. Mais d’un coup de volant, j’ai balayé le tout pour me diriger vers les cotes d’Ejdaria. (El Bibane). Sur la route, j’ai empêché un Libyen de doubler dans un virage et effectivement il y avait un bolide qui venait d’en face, alors le Tripolitain, m’avait fait plusieurs signes sonores et lumineux de gratitude…pendant que je disais en moi-même : « Du calme mon ami, tu vois devant toi, mes assemblages artistiques géantes sur les cotés de la route pour t’ouvrir les yeux et l’esprit, mes textes sur le net pour un parcours pacifique de la révolution Libyennes, et toute une poésie et une littérature de soutien et d’accompagnement… Au moins, on aura l’arrêt de la catapulte humaine, des Mamadou et des Momo. Et par la même occasion frères Libyens, s’il vous plait, « Yarham waaldikom » prenez vous en charge et entrez dans l’histoire par sa grande porte, celle de la paix et de l’humanité».

Sur la plage, pieds nus, avec mon chapeau de paille et mon grand sac postal, je faisais les un, deux, trois, quatre, c.-à-d., je regarde l’espace immédiat de ma droite, je regarde l’espace de ma gauche, je regarde l’espace devant moi sur quatre mètres et je regarde l’espace général devant moi au niveau de ma hauteur. Une sorte de balayage efficace et permanent, pour éviter de marcher sur les bouts de verre et les tiges de plantes pointues. J’ai trouvé quelques bouteilles en verre que j’ai mises dans mon sac, des flotteurs, des pots à fleurs vides, des caisses de poisson encore valable pour ma collection de poterie, quelques boules flotteurs… Entretemps, un groupe de pigeons d’environ cent cinquante unités allant vers le nord sur une largeur de cent mètres, longeant la cote en quête de fraicheur, m’avait croisé sans prévenir et sans que je puisse le prendre en photo. Un corbeau que je vois pour la première fois en dehors de l’Île de Djerba, départageait l’espace végétal de l’endroit, avec un aigle qui se fixait immobile au ciel pour piquer sur d’éventuels oisillons ou rongeurs. Sur presque tout le parcours, plusieurs bouteilles à moitié pleine d’un liquide jaune, marron et quelques fois rouges, qui n’était rien d’autre que l’urine des soldats-marines des bâtiments de guerre qui crachent le feu sur les villes de la Cyrénaïque. Bien sur c’est un indice fâcheux du passage des fachos, sur mes espaces de liberté…me laissant perplexe à ruminer le malheur de mes voisins et l’implosion (Crunch) de leur potentiel de guerre colossal et terrible. J’ai raté une deuxième fois une colonne géante de pigeons que j’ai constatés tardivement par le froufrou des centaines d’ailes. Le temps était merveilleux et je devais traverser de petites rivières d’eau de mer desservant les marais…. avec un plaisir immense de me faire chatouiller les plantes des pieds par les algues, les coquillages, les marécages…tout en enfonçant quand il le fallait, l’orteil dans la terre à chaque pas pour éviter les glissades et la chute de mes quatre vingt dix kilos de matière. Soudain, j’ai ressenti une douleur aigu sous mon pieds gauche et dans un reflexe ultime je l’ai retiré de justesse d’un fond de bouteille cassé. La douleur est intense et j’ai du enfoncer mon pieds dans l’eau pour voir s’il saigne, heureusement j’ai échappé des quelques mois de béquilles et de claustrations. Pourtant, je ne laisse jamais de verre sur les plages que je ramasse soigneusement au fur et à mesure de mes randonnés. Regardant autour de moi, j’ai constaté que s’était l’endroit où j’ai trouvé auparavant, la « carcasse » de mon ami Mamadou II l’un des victimes de la Harga du début du millénaire et je crois que c’était sa « Baraka » qui m’a sauvé. En effet j’étais sincère avec lui, mon ami, je l’ai pleuré de rage, j’ai prié, crié à pleins poumons, j’ai protesté, je me suis prosterné, dans un nuage de colère envoutant… Voilà, juste à l’endroit où mon ami s’étendait bercé par les vagues, avec son jean et sa ceinture encore nouée, sans tête, seules ses cotes me pointaient du doigt accusateurs et réprobateurs… il a gardé sa tête pour la mer pour ne pas subir la bêtise humaine et la cruauté de son silence complice.

Cette « Baraka » en retour, qui m’a sauvé d’un accident fâcheux, a aussi déconstruit les bases de lancement des ogives humaines et leurs commanditaires, a détruit les catapultes des boulets en chaire humaine que les dictateurs instrumentalisaient cyniquement. Cette « Baraka » qui a définitivement rompu le rêve de la Harga vers le nord par la déception et la désillusion des milliers de jeunes aspirants. Elle a aussi protégé, cette terre d’accueil, de paix, de solidarité, d’humanité, des milliers de missiles, des armes chimiques, des mines, de l’artillerie lourde…qui n’avaient pas d’autres cibles que le sud Tunisien…

Cette « Baraka » qui se manifesta, quand le gri-gri de la jungle s’inspira de la mer, quand les prières supra religieuses de Boughmiga parvinrent à l’au-delà, quand les lamentations des corps flottant sur les vagues, les souffrances des mères meurtries dans l’attente d’un retour de l’enfant chéri, quand les cris de désapprobation des cormorans blancs au dessus des barques coulantes… retentirent dans d’interminables échos de plaintes…, est certainement, l’offrande de Mamadou, à l’humanité des hommes, pour finir avec les violences et les nonsenses.

Merci, Mamadou II, merci mon ami, que ton aura investisse les cœurs des hommes de la mer, du désert, de la jungle et du foret, pour y insuffler sagesse, paix et bonheur pour tous.

Lihidheb mohsen éco artiste Zarzis

Mémoire de la mer et de l’homme 10.10.2011

Wednesday, May 25, 2011

Mamadou, Adios Mamadou


Mamadou, Adios Mamadou.

Encore une fois aux abords de Jabyet el Haj Ali à Ejdaria, sur la plage au niveau de la jetée, plusieurs vêtements s’étalaient devant moi, avec leurs secrets, leurs odeurs, les gènes, leurs mémoires… des pantalons avec leurs ceintures, des vestons, des chaussures de sport de toutes les tailles dont une paire de 48, des tricots, des robes de femmes colorées à l’africaine, des châles, des chapeaux sport, des chaussettes, des piles de radio, des papiers froissés portant des adresses illisibles et la couverture cartonnée d’une bible. Le tout était éparpillé en un seul endroit et ne paraissait pas sortie avec les vagues de la mer, car les objets étaient sec et sortis au même endroit. Cette situation énigmatique m’a angoissé, des vêtements personnels sans leurs porteurs, parvenues étanches…laissent à imaginer plusieurs hypothèses inhumaines dans ces circonstances de ruées « clandestines » vers l’Occident promis, qui sont déjà dans leur dimension normale, assez dramatiques et cyniques. Comme d’habitude, comme je l’avais fait avec Mamadou I,II et III, et en rageant, j’ai fait une prière à leur mémoire et resta longtemps silencieux devant cette mer qui recrache sans états d’âme, toutes les intrusions dans son territoire, aussi justes et justifiées soient elles.

Quelques jours plus tard, une partie du secret s’est dévoilée, quand un berger m’informa que quelqu’un avait tracté une grande embarcation de l’endroit décrit vers sa ferme et laissa les vêtements sur place, tout en veillant à emporter les portables et les objets de valeurs. Mais l’énigme reste entier, Mamadou, Mohamed et Mao…ont vraisemblablement été contraint à écourter leur grande marche…écologique. Seraient-ils secourus en pleine mer ? Seraient-ils immergés l’un après l’autre par l’homme aux pieds 48 ?

Les pêcheurs de Zarzis sont de braves gens, qui respectent la mer, les tortues, les dauphins et n’hésitent guerre à porter secours à quiconque. Mais quelques fois, ils sont obligés de faire attention quand ils se trouvent devant des bateaux de naufragés en panne et se limitent à s’en approcher pour leur fournir eau et vivres et alerter les autorités maritimes pour les prendre en charge en les dépannant ou les amener à terre. Les pêcheurs ne pouvaient pas faire plus car les « harraga » en état de détresse, aussitôt secourues de pré, pourraient jeter les marins à la mer et prendre le bateau pour repartir vers Lampedusa. D’ailleurs, ils sont très sensibles à ce phénomène, qui les dérange, sur le plan humain, sur le plan du désagrément face aux cadavres qui arrivent de temps en temps, sur le plan des réserves des consommateurs de poisson pendant les naufrages des clandestins et surtout face au risque de se voir voler le bateau par des passeurs criminels et sans scrupules. Un Raïs, capitaine d’un bateau de pêche, me raconta comment un jour tôt le matin, tout de suite après avoir saluer à droite et à gauche sa fin de prière, regarda en face sous les premières lueurs du soleil et put constater avec terreur entre les vagues berceuses, le cadavre flottant inerte d’une femme portant son bébé sur le dos. Le Raïs glacé de compassion et de colère froide, ne put que recommencer sa prière, avec cette fois, des supplications pressantes et désespérées.

En voyant le grand bus devant le poste de la Garde Maritime, j’ai déduit rapidement que c’était une affaire de clandestins et j’ai freiné sec, pour constater et éventuellement assister. Effectivement, c’était une trentaine de jeunes noirs dont quelques femmes, dans une situation pitoyable sur les plans de la santé et de l’épreuve physique et morale qu’ils viennent de subir. Ils viennent d’être sauvés d’un naufrage certain et à force d’être resté longtemps accroupies entassés dans un petit bateau, ils marchent courbés et titubants par l’effet encore actif du mouvement des vagues. Je revenais juste de ma randonné écologique et portais un plein « dhollala karmouss » un grand chapeau de paille plein de figues fraiches et mielleuses que j’ai offert aux rescapés, mais les Gardes l’avaient pris sous prétexte d’attendre le médecin. J’ai du alors aller en ville pour chercher de l’eau, du pain, du lait, du fromage et les commerçants étaient réellement solidaires et n’avaient pris que la moitié des factures. J’étais heureux d’assister à des clandestins qui ont échappé à un destin macabre mais, malgré mes sourires, mes grimaces, mes gestes de sympathie, les jeunes étaient toujours impassibles et hagards, alors j’ai déduit et compris, qu’ils préfèrent mourir que revenir au point de départ et repartir à zéro s’ils en auront les moyens, ce qui n’est pas évident. Toutefois, j’ai vérifié avec Monsieur le Délégué des assurances qu’ils seront bien traités et conduits vers un centre d’accueil où ils auront droit à une douche, des vêtements, de bons repas et une consultation médicale. Mais, j’ai tout de même signalé l’absence de médecin sur place et revendiqua un meilleur accueil pour nos frères en difficultés.

Ainsi, devant ce cercle vicieux, de l’émigration clandestine actuelle et future, sur la Méditerranée, la mer rouge, Gibraltar ou le désert du Mexique, que le réchauffement climatique, le dérèglement de la société locale par un colonialisme en veille et l’inégalité des chances à une vie descente…déclenchent et catalysent durablement, la communauté internationale doit sérieusement traiter le problème à la source, par la stabilisation et la réintégration des jeunes sur place, avec des possibilités d’emploi et des conditions viables. Bien sur, la manipulation mentale au niveau du comportemental et conceptuel, doit aussi être déconstruite par la revalorisation de la culture locale et la dépolarisation de l’idéal. Nul n’ignore, les intérêts morbides et douteux des parties dans ce flux humain, que certaines d’entre elles, utilisaient comme une force de travail presque gratuite dans le marché noir, d’autres fermaient les yeux pour se débarrasser d’une catégorie de la population réputée énergique et revendicative, d’autres encore utilisaient ce phénomène pour bombarder l’occident avec ces ogives humaines, pour des avantages politiques qui ne valent pas les milliers de victimes innocentes. Heureusement, depuis un certain temps, les tentatives d’émigrations clandestines ont diminuées, peut être à cause du retranchement drastique de l’Europe derrière sa forteresse géographique et ses lois dissuasives, mais aussi à cause de l’aboutissement de certains enjeux géopolitiques de compensation et de retrouvaille « de vieux amis ». Tant mieux, pour nos frères contraints à l’émigration écologique de ne plus s’aventurer à l’aveuglette ou servir d’appâts aux belligérants, mais on ne peut tout de même fermer pour longtemps une rivière par un barrage étanche au risque de le casser et il faudrait résoudre les problèmes de l’Afrique et des pays pauvres très sérieusement et en symbiose avec les démarches visant à la limitation du réchauffement climatique.

Enfin, ouf, Mamadou, Adios Mamadou, car comme c’était pour les Ritals, les Polanski, les Irlandais, les pionniers westerniens, …les néanderthalien, l’homme primitif dans touts ses états et étapes…, l’émigration écologique était toujours un facteur de santé pour l’humanité, un facteur de diversité génétique et culturelle…qu’il faudrait humaniser et comprendre. Et que l’Europe ouvre les ponts-levis de sa forteresse de granite et que les murs de la honte au Mexique et à Gaza se désintègrent pour la fraternité entre les hommes.

Lihidheb mohsen Eco artiste

Zarzis TN 03.09.2009

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Mamadou III


Mamadou III

C’était un après midi d’une journée de fin du mois de Ramadhan, habitué au jeûne et la starvation, je longeais comme d’habitude une côte rocailleuse et difficile, à récolter ça et là des bouteilles ou d’autres objets rejetés par la mer. A cause de ma capacité de transport, je ne ramassais pas tout, et me limitais à mon caprice sur les formes, la couleur, l’origine, ou la possibilité de recyclage utilitaire ou artistique. Avec le temps, je me suis familiarisé avec les marques et les différends jeux de tombola et loto sur les bouchons des bouteilles, et participe ainsi avec les Italiens, Maltais, Turc, Français, Yougo…leurs faux espoirs. D’ailleurs, plusieurs nouvelles marques et sous produits, me parviennent par la mer, au moins une année, avant leur arrivée sur les stores des super marchés (que je n’entre jamais) de Zarzis. Je reçois aussi de temps à autres des messages dans des bouteilles à la mer avec de différends appels et vœux, mais, vu ma sensibilité et ma communication totale avec tout ce qui m’entoure, je vois et lis des messages dans tout ce qui vient de la mer et tombe sous ma main.

Ce jour là, je n’étais pas pressé, mon grand sac postal grossissait progressivement sur mon dos, une caisse vide en plastique dans la main et une grosse corde attachée à ma taille trainait derrière moi. Avec le poids, je me déplaçais difficilement dans mes sandales dont les clous piquaient mes pieds, poussés par les rochers, mais heureusement, habitué à la douleur et la souffrance, ces indispositions physiques ne me dérangent pas et passent souvent inaperçues.

Pourtant, la douleur était incontournable, intense et très douloureuse, lorsque j’ai trouvé mon nouvel ami Mamadou III, sur une plateforme rocheuse, déposé par les vagues de la dernière tempête. Sa tête scalpé jusqu’à l’os brillait par sa blancheur et par le contraste avec les algues noires déposées tout au tour de ce qui restait de son corps. Il ne restait plus grand-chose de mon ami, juste quelques muscles du buste et d’autres plus développés sur la cuisse gauche. Les membres disloqués sous sa carcasse, tenaient par quelques tendons résistants aux mouvements des vagues et les frottements sur les rochers. Encore, comme chaque fois que ça m’arrive, mon âme est traversée de bout en bout par la colère et l’impuissance, devant cette iniquité, ce génocide des pauvres, qui acculés par la nature ou la conjoncture, ont sacrifié leur vie, pour une traversée incertaine vers le Nord promis, le Nord interdit, le Nord maudit. Ces pauvres qui, au lieu de se révolter, de s’insurger, de s’imploser en camicases, … ont préféré se déconstruire en silence, sans nuire, sur les dunes du Sahara ou entre les vagues de la Méditerranée ou Gibraltar. Chaque fois, je restais planté devant mon ami, figé par le désarroi et la colère, ne sachant ni pleuré, ni crier ma rage, … impuissant, castré par le néo capitalisme sauvage, meurtris par la partialité des chances et des droits à la vie.

En rentrant, j’ai hésité à informer la protection civile de l’infortune de mon nouvel ami et l’endroit de son échouage, et après mure réflexion, je me suis abstenu de le faire, car, dans cet endroit Mamadou III ne risque rien et peut attendre quelques jours. Que notre ami passe la fête de l’Aïd El Fitr, avec nous, parmi nous, dans ce bel endroit, et que les agents de la protection civile, véritables guerriers de l’humain, passent la fête sans amertume et désagrément. Ces agents qui sont souvent submergés par le nombre de cadavres de « Harraga » échouant sur les plages de la ville et sa région, au point de ne pas répondre à mes signalements de morceaux de squelettes que je trouve quelques fois, ce qui m’oblige à les enterrer moi-même, avec un grand respect, dans mon cimetière secret sur une belle petite colline au bord de la mer.

Ainsi, nous passâmes tous, la fête, sans pouvoir oublier cette angoisse qui travaille les entrailles et la conscience et la Protection civile, fit bien son travail, et mon ami Mamadou III, eut droit au respect et la dignité, et se repose enfin, auprès de ses frères Zarzissiens.

Lihidheb mohsen

Eco artiste 4170 Zarzis 03.11.08

La révolution et la harga


La révolution et la Harga

Le phénomène d’émigration clandestine, d’avant la révolution du peuple, servait les uns et les autres à rejoindre le paradis promis en Europe à partir de la Lybie ou de la Tunisie, comme il servait les politiques à se débarrasser d’une catégorie sociale encombrante sur les plans de l’embauche et la délinquance. Alimenté par une vie dure dans le pays, la sécheresse, le mauvais partage des maigres disponibilités, cet exode qu’on osait qualifié d’écologique ou écolo-politique, s’est arrêté depuis plus d’une année par une législation drastique aux pays de l’arrivée et du départ des « Harraga ».

Profitant du vide sécuritaire et la « compréhension » des pays d’accueil, les émigrés, les passeurs et les sournois marchands d’hommes, ont profité de cette situation pour organiser des navettes éclairs, entre Zarzis et l’Île de Lampeduza en Italie, à deux milles dinars la tête, transportant environ trois milles personnes jusqu’à maintenant. Il y aurait aussi trois embarcations accostées par la marine Tunisienne et ramenés au port de Sfax avec leur chargement d’hommes. Un bon nombre serait aussi à l’hôpital dans un état de faiblesse critique à cause de leur errance dans la mer pendant des jours sans eau ni vivres, pour se retrouver sur les cotes d’Elbibane. Un paquebot en panne aurait utilisé les tricots pour tisser un voile grotesque qui les a quand même ramenés à la cote. D’autres ont eu moins de chance et auraient chaviré laissant des morts dont trois sont confirmés, pendant qu’on parle d’une trentaine.

Malgré le contrôle de l’armée sur le port de Zarzis, toutes les plages de la région sont devenus une passoire et des groupes de gens sont perceptibles tout au long de Souihel et Hassi Jerbi, en train de rabattre les postulants, négocier les prix, organiser l’embarquement, faire monter les réserves de carburant ou calmer les rixes. Toute la ville est sillonnée par des voitures de location nerveuses, au service des passeurs, les commissionnaires et les organisateurs de ce pont fructueux. On assiste aussi à l’usage de gros tonnages dont l’un aurait transporté, hier soir trois cents cinquante personnes à la fois. Jusqu’à maintenant, les jeunes affluent vers Zarzis de l’intérieur du pays et même du nord, la gare de Zarzis, les cafés sont grouillants de jeunes, la poste est en cours d’argent pour couvrir la demande massive des retraits et des transferts de l’étranger pour des candidats de Tataouine et d’ailleurs.

Ces jeunes qui ont sacrifiés leurs vies pour la révolution, paraissent inconscients de leur réalisation, risquent encore à tort ou à raison, de bruler les étapes, comme certaines corporations et participent à l’immolation et l’incinération en mer cette fois, de notre destiné.

Lihidheb mohsen eco artiste 12.02.2011

(A la mémoire des martyrs et des victimes de la révolution)

Mémoire de la mer et de l’homme Zarzis

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Entre Zarzis et Lampedusa

Entre Zarzis et Lampedusa

De l’autre coté de la mer,

Tu enterres les corps de mes frères,

Je sais, je sais ce que tu ressens,

A force de l’avoir fait souvent.

C’est dur, très dur, mon ami,

D’être témoin de cette infamie,

Avec un sentiment d’impuissance,

Devant cette cynique violence.

Mois aussi sur le littoral sud,

Ce sont Mamadou, Ali et Oualid,

Que j’ai humblement accompagné,

Avec des prières au ciel criées,

Pour faire parvenir leur calvaire,

A Dieu l’immense de l’univers.

Tu n’as pas seulement enterré les corps,

Mais l’âme de toute l’humanité.

Tu étais seul devant chaque naufragé.

Il était seul quand tu l’as enterré.

Chacun était seul sur les vagues de la mer.

Chacun a quelque part un père et une mère.

J’étais seul à les mettre sous terre,

Ils étaient seuls arrosés par mes sueurs.

Un oiseau seul survolait la scène,

De deux hommes qui s’enterrent sans haine.

Oui, mon ami Vincenzo Lombardo de Lampedusa,

Moi, de Zarzis, Mohsen surnommé Boughmiga,

Nous sommes certainement les seuls amis des Harraga,

Que nous avons bien traités vivants, bien traités morts,

Que nous avons respecté, comme des frères,

Dans ton cimetière de Lampedusa,

Et sur mon monticule de Ras Lemsa.

Merci à toi, mon vis-à-vis de l’autre coté de la mer,

Au moins, maintenant, je sais qu’il reste encore,

Un espoir au fond de la conscience humaine,

Pour résoudre l’émigration clandestine,

En créant du travail aux pauvres chômeurs,

Pour que leurs corps n’errent plus sur la mer.

Lihidheb mohsen éco artistes, 18.05.2011

Mémoire de la mer et de l’homme Zarzis

(Une poignée de main, au dessus de la mer,

à la mémoire des victimes de l’émigration clandestine)

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